HISTOIRE
D'UN OISEAU DE FEU
Par Pierre Efratas
Paru
dans PHENIX n°50 (mars 1999)
C'est fou comme certains anniversaires tombent bien :
nous fêtons le nôtre au moment où, jamais depuis les
années cinquante, la vague des littératures de
l'imaginaire n'a écumé plus haut. Les publications SF,
fantastiques et tutti quanti se télescopent, le multimédia
et le cinéma font chorus, et les revues de genre,
petites ou grandes, spécialisées ou généralistes,
académiques ou grand public, se pressent dans les linéaires
et les devantures.
Il n'en a pas toujours été ainsi, loin de là. Il fut même
un temps pas très lointain où de doctes rescapés
bibardus de la Planète Imaginaire ratiocinaient en d'étiques
assemblées recueillies sur la liturgie du " ghetto
de la science-fiction française " (ici : psaume sur
musique de 'In The Ghetto') ou encore sur "
l'impossibilité qu'il y a d'intéresser des lecteurs
cartésiens aux uvres de fantaisy " (Saint-Tolkien,
priez pour nous).
En ce temps-là, le monde des revues n'était qu'un désert
plus ridé encore que les caravaniers qui le
traversaient, transportant avec abnégation la Flamme de
conventions en congrès dans l'attente mystique du
renouveau. Sous un pareil climat, la plupart des feuilles
ne tenaient pas leurs trois numéros, la sénescence du
grand arbre " Fiction " avait figé chacun
d'horreur et il ne restait plus à la SF Canal Historique
qu'à publier des canards clandestins très vite déplumés.
De plus, de fanzine à fanzine, on se méfiait ou on
s'ignorait superbement, on se critiquait, on se
jalousait, on s'envoyait des flèches empoisonnées, ou
on se regardait en chiens de faïence quand on ne se
disputait pas vilainement comme des cabots (sous ces
aspects-là, je te rassure, c'est toujours le bon vieux
temps).
Il fallait donc une formidable dose d'inconscience, donc
de jeunesse, pour prendre le pari de monter une nouvelle
revue destinée au plus large public d'une francophonie débarrassée
de ses frontières absurdes, sans trop de chichis
intellos ni de tralalas mercatiques. Une revue
ambitieuse, certes, mais qui essayerait de ne pas trop se
prendre au sérieux.
Là où l'entreprise prenait un tour carrément épique,
c'est que l'équipe de départ ne possédait que son
capital d'enthousiasme. De surcroît, il fallait
instamment se fourrer des boules Quiès dans les étagères
à mégots pour ne pas entendre les trois malédictions
culturelles adressées aux pères (et mères) fondateurs.
Primo : la langue française pèserait son content de
peanuts face à l'anglo-saxisme galopant. Secundo, éditer
depuis l'Outre-Quiévrain consisterait à passer pour des
provinciaux patoisants confondant Voltaire avec une
marque de mayonnaise. Tertio, dans le cadre de l'État
belge déliquescent, les créateurs francophones de
Wallonie et de Bruxelles devraient se recroqueviller
comme de honteuses Cendrillon sur leur citrouille aussi
minoritaire que déficitaire.
Le problème, c'est qu'en créant Phénix, Marc Bailly et
consorts ajoutaient à leur candeur deux autres défauts,
rédhibitoires certes, mais qui, à l'expérience, se révéleraient
salvateurs : la méconnaissance feinte de la géopolitique
et de ses uvres ainsi qu'un caractère carrément
cabochard, infiniment récalcitrant aux grands discours.
(Il est vrai que je n'étais pas encore de la bande :
vous verriez comme ils ont changé en bien.)
Quatorze ans plus tard, Phénix tient toujours. Mieux :
il se porte comme un charme, et son équipe multiplie les
projets, à commencer par " Imaginaire 99 ", le
Premier Festival International des Littératures de
l'Imaginaire de Bruxelles qui se déroule au moment même
où vous découvrez ces pages.
De quelques dizaines d'exemplaires vendus de la main à
la main en 85, Phénix est passé à plusieurs milliers
d'exemplaires dans toutes les bonnes librairies et
maisons de la presse de France, de Belgique et de Navarre.
Ses pages ont accueilli les plus grandes plumes et ont
contribué à faire connaître celles qui allaient
s'affirmer quand personne n'aurait osé parier un kopeck
sur leur carcasse. Ses initiatives ont souvent
enthousiasmé, parfois fait grincer des dents ou carrément
scandalisé les bonnes âmes et les moins bonnes. Banco.
C'était bien cela que recherchaient ses fondateurs : réveiller
les littératures de l'imaginaire, les sortir de leur
quartier réservé, stimuler les débats, susciter des
interrogations, organiser des rencontres.
Place donc, en version digest(e), à l'historique de
votre oiseau de feu préféré...
Première période
ou : l'oiseau naît dans le feu de l'enthousiasme.
La naissance de Phénix : mai 1985 (73 pages)
Après plusieurs semaines de profondes cogitations et de
discussions acharnées sur les thèmes et la dénomination
à adopter (vous avez échappé à Atlas, Rainbow, etc.),
il est né le divin oiseau. L'asbl SPHINX (association
1901) soutient ses coupables entreprises.
Ce premier numéro de collection, actuellement
introuvable (ou presque), est entièrement réalisé avec
une petite machine à écrire. Il faut à Marc Bailly un
week-end complet de sueur et de rage pour monter à la
main une maquette de 73 pages à peine. Le premier comité
de rédaction comprend, outre Marc, Brigitte Rolin et
David Martin.
Le premier éditorial donne le ton : "Pourquoi
sortir un nouveau magazine dans le marasme incandescent
de la SF ? " s'interroge-t-il, non sans raison.
" Nombreux ont été ceux qui ont essayé et peu
d'entre eux ont réussi à tenir le coup. Peut-être
aurons-nous plus de chance ?...
Je vais vous laisser là, pour la première fois, en espérant
qu'il y en ait une seconde..."
Côté contenu, le numéro comporte des nouvelles
d'auteurs francophones et une première traduction de
l'Espagnol uruguayen.
Les bases des futurs dossiers sont jetées avec un
premier article sur Merritt concocté par Jacques Van
Herp, ainsi qu'un survol de la littérature latino-américaine
par Bernard Goorden.
Sur le front de l'édition, quelques fanzines se
disputent alors un tout petit marché : Proxima, Altaïr,
Options, Octa, Magie Rouge, Vopaliec, Le Chat Murr.
Numéro 2 : septembre 1985 (142 pages)
À peine porté sur les fonts baptismaux, Phénix
inaugure un nouveau dos, joliment carré. Quant à la
frappe des textes, elle s'effectue toujours à l'aide
d'une simple machine à écrire.
L'équipe s'enrichit de l'arrivée de Murielle Briot qui
va révolutionner Phénix, tant sur le plan graphique que
rédactionnel. Le contenu gagne en qualité, cependant
que les Éditions Phénix voient le jour.
Ces 142 pages comportent des nouvelles en langue française,
mais aussi la traduction d'un texte argentin. Vente du
premier poster de Kinet "La Dame de l'orage".
Interview de Asimov. Article sur Phénix et les oiseaux
dans la SF et le fantastique.
D'autres revues se présentent au public : Sfère, A et
A, Main-tenant.
Numéro 3 : décembre 1985 (176 pages)
Premier dossier Phénix pur jus, consacré à Thomas
Owen, avec une interview de plus de 40 pages. La critique
commence à prendre Phénix au sérieux, ce qui n'est pas
fait pour déplaire à notre poignée de pionniers.
Même équipe rédactionnelle, mais changement sous
l'angle technique : le numéro est réalisé sur
ordinateur avec (enfin) des textes justifiés à gauche
et à droite.
Premier souvenir marquant : Murielle Briot et Marc
Bailly, hésitant comme avant un examen, face à la
maison de Thomas Owen. Marc et Murielle racontent :
"Nous étions en septembre. Il y avait la chaleur,
des bandes d'oiseaux, un ciel magnifique, mais aussi la
peur, cette peur au ventre qui faisait que, malgré la
chaleur, nous avions froid. Nous éprouvions un trac
terrible : Owen était le premier grand Monsieur que nous
rencontrions dans ce milieu. Comment allait-il nous
recevoir ? Serions-nous à la hauteur ?"
Ce baptême du feu se passe au mieux et le numéro trois
comporte plusieurs nouvelles signées, notamment, de
Thomas Owen, d'Alain le Bussy, alors inconnu du public,
ainsi qu'un texte brésilien traduit en français.
Deuxième poster de Murielle Briot intitulé "Le Maître".
Revues existantes : Yellow Submarine, Morgoth. Hélas,
Octa décède pieusement.
Numéro 4 : mars 1986 (200 pages)
On se renforce : Murielle Briot et Alain Vandenberghe
rejoignent le comité de rédaction.
Deux dossiers au programme. Le premier est consacré à
Van Vogt et le second à Gérard Prévot. Interview de
Van Vogt. Nouvelles de Gilles Bergal. Poème de John
Brunner. Troisième poster de Brigitte Rolin intitulé
"La planète aux trois soleils ". À première
vue, ce numéro paraît instaurer une heureuse routine.
En réalité, il vient de franchir un nouveau pas
qualitatif en donnant la parole à des monstres sacrés.
Et du côté des revues existantes ? On compte Arachné,
Mater Tenebrarum, Carfax, Weird, Halloween, Séries B.
Numéro 5 : juin 1986 (202 pages)
Cette fois, Phénix a pris le mors aux dents, en dépit
du départ de Brigitte Rolin. Dans ses pages de plus en
plus nombreuses, le lecteur trouve la première partie du
dossier Lovecraft qui ne comptera pas pour rien dans
notre crédit naissant, ainsi que des nouvelles de Daniel
Walther.
L'éditorial en dit long sur l'esprit qui anime l'équipe
fondatrice : "Au début de notre entreprise, nous
nous étions fixé une limite. Cette limite, c'était le
numéro 5.
Au début de notre entreprise, nous nous étions dit
qu'il ne fallait pas faire de bilan avant le numéro 5,
avant notre première année d'existence.
Quel est donc le bilan maintenant ? Il est plus que
positif."
Au nombre très fluctuant des revues existantes, on
trouve Démons et merveilles.
Un premier programme de publication est établi, qui va
jusqu'au numéro 10.
Deuxième période
ou : l'oiseau prend son envol.
Numéro 6 : septembre 1986 (262 pages)
Deuxième partie du dossier Lovecraft, qui fera sensation
: lors de la convention française de Lille, les membres
de l'équipe n'eurent pas le temps de déposer leur
uvre sur la table : en quinze minutes chrono, les
trois quarts de la production Phénix étaient vendus.
Nombreux articles de Jacques Van Herp, Robert Bloch, François
Truchaud, E.C. Bertin.
Voilà pour les bonnes nouvelles. En ce qui concerne les
mauvaises, on note la disparition de Borgès et de Julia
Verlanger. Les magazines Sfère et Halloween sombrent
corps et biens, et Alain Vandenberghe quitte l'équipe de
Phénix.
Revue existante : Poivre Noir.
Numéro 7 : décembre 1986 (206 pages)
Dossier consacré à Jean Muno, un grand monsieur de la
littérature française de Belgique, hélas trop méconnu.
Ce personnage emblématique des lettres fantastiques s'avère
aussi sensitif que gentil et talentueux.
Entrée d'Isabelle Pourbaix au sein du comité de rédaction.
Première traduction d'une nouvelle néerlandaise de Eddy
C. Bertin. Belle interview de Muno qui la corrige de fond
en comble ! Fac-similé d'une page corrigée : on y découvre
le vrai travail de l'écrivain. Le tout est accompagné
d'un inédit de Muno.
Premier numéro d'une rubrique régulière signée Robert
Duterme.
Les numéros 1, 3 et 5 de Phénix sont déjà... épuisés
! Par contre, les membres de l'équipe ne le sont pas.
Numéro 8 : mars 1987 (214 pages)
Un véritable festival, que ce numéro 8 !
Au menu, la première partie du dossier Fritz Leiber :
" Leiber en SF ". Interview du grand maître.
Plus des nouvelles de Daniel Walther et de Roland C.
Wagner, parmi bien d'autres.
Annonce de la sortie du premier numéro de Chimère et de
la création du prix Phénix sur le thème de "La
Bavure". Création également de la collection
"Le Miroir sans tain" qui comptera deux titres
seulement. Mais comme le disait Guillaume d'Orange :
" Il n'est pas nécessaire d'espérer pour
entreprendre ", etc.
Numéro 9 : juin 1987 (254 pages)
Deuxième partie du dossier Leiber (analysé cette fois
sous l'angle du fantastique et de l'heroic fantasy).
Robert Duterme et Jacques Van Herp font leur joyeuse entrée
dans le comité de rédaction.
Échange de courrier avec Leiber et son fils. Grande
gentillesse de la part d'un auteur aussi talentueux.
Quatre inédits de Leiber qui parviennent à destination
à la toute dernière minute. Résultat : Jacques et
Martin doivent se mesurer aux délais dont ils triomphent
non sans récriminations. Premier article de Grands-Pas
qui fait son entrée officielle dans cette équipe très
sympathique, en compagnie de Pierre Efratas. Une rumeur
insistante les prétend très liés l'un à l'autre.
Poursuite des travaux du jury du prix Phénix qui réunit
sept membres (Marc Bailly, Robert Duterme, Bernard
Goorden, Jean Muno, Thomas Owen, Anne Richter et Jacques
Van Herp).
Les numéros 4 et 6 augmentent la liste glorieuse des épuisés.
Numéro 10 : septembre 1987 (230 pages)
Cette fois, le dossier est consacré à Robert Bloch qui
se révèle très disponible. Interview, plus deux inédits
de l'auteur. Nouvelles d'Emmanuel Jouanne, premiers
articles de Daniel Derbaudrenghien qui fera souffler un
vent nouveau quelques numéros durant. Première partie
d'une rubrique régulière signée Michel Lamart.
Étonnement de Bailly devant le succès de sa revue. Il
n'avait pas fini d'être surpris. La preuve avec le numéro
suivant...
Numéro 11 : décembre 1987 (262 pages)
Dossier Jean Ray. Ce numéro-événement donne la parole
à pas moins de douze personnes qui ont connu ou côtoyé
Jean Ray ! Au menu, un tour de Belgique complet à la
rencontre de ces différentes personnes, tour de force
que l'on doit à Murielle Briot, âme et instigatrice du
complot.
Ce numéro comporte également des hommages sous forme de
nouvelles signées Van Herp, Dartevelle et Baronian. Plus
trois nouvelles de John Flanders. Rencontre avec un homme
important : monsieur Albert Van Hageland, qui fut un
agent littéraire ayant pignon sur rue, et notamment sur
celle, réputée dans le monde entier, de monsieur John
Flanders.
L'édito pose une question non résolue à ce jour :
"L'uvre d'un écrivain est-elle plus
importante que l'écrivain lui-même et que la vie qu'il
a vécue ?"
Naissance de Chimère, la petite sur de Phénix,
avec la sortie du premier numéro. L'auteur de ces lignes
se souvient avec émotion d'avoir participé à cette
première anthologie.
Numéro 12 : mars 1988 (266 pages)
Dossier consacré à Robert Howard. Nombreux articles,
dont une contribution de Fritz Leiber.
Guy Grudzien remporte le Prix Phénix, triomphant de 105
concurrents issus de Belgique, de France et du Québec.
Le prix est remis à l'occasion de la Foire du Livre de
Bruxelles avec flonflons, orchestre, grimage (photos
compromettantes de Marc Bailly sous clef dans une banque
du New-Jersey) et participation de la troupe du "Magic
Land Théâtre", bien connue pour ses débordements
délirants et hilarants lors du Festival du Film
Fantastique. Ce moment étonnant ne sera pas oublié de
sitôt par les polytraumatisés qui l'ont vécu.
Nouvelle revue : Chat Noir.
Le numéro 8 de Phénix est épuisé.
Numéro 13 : juin 1988 (250 pages)
Mort de Jean Muno. En guise d'hommage et de gratitude, le
numéro lui est dédié.
Dossier consacré à Ramsey Campbell, avec interview et
trois inédits du Master, plus nombreux articles d'Anglo-Saxons.
Le numéro 2 de Chimère sort de presse. Il est consacré
à Michel Lamart.
Parution du premier numéro des "Moustaches de
Baalmoloch" avec une nouvelle " à plusieurs
mains ", écrite successivement par A. Arslan, J.-E.
Garrido, R. Duterme, M. Briot et M. Bailly.
Phénix numéro 11 : épuisé ! L'équipe, elle, ne l'est
pas, en dépit des coups du sort.
Numéro 14 : septembre 1988 (254 pages)
Phénix a beau progresser, la série noire continue :
Robert Duterme décède inopinément d'un cancer généralisé
foudroyant. Marc Bailly en est fort affecté car il a vu
Robert Duterme tomber malade et s'éteindre en quelques
jours à peine. Comme il se doit, ce numéro est dédié
à notre ami.
Dossier Robert Silverberg, avec interviews de Jacques
Goimard et des responsables de la maison d'édition
" NéO ", ainsi que divers articles, dont un
signé Jean-Claude Vantroyen, critique au grand journal
bruxellois Le Soir.
Un premier comité de rédaction est mis sur pied, ainsi
que des procédures éditoriales et techniques
professionnelles. Ses membres : Marc Bailly, Murielle
Briot, Eric Dejaeger, Marc De Leeuw, Daniel
Derbaudrenghien, David Martin et Pierre Efratas.
Numéro 15 : décembre 1988 (318 pages)
Spécial " Fictions belges ". Un nouveau numéro-événement
avec pas moins de 21 textes de SF, de fantastique et d'HF.
Important article de Vantroyen dans Le Soir, consacré à
ce numéro, avec quelques-uns des auteurs qui l'ont
constitué.
Chimère numéro 3 est sorti, en compagnie de Baalmoloch
numéro 2.
Réédition des numéros consacrés à Lovecraft sous la
forme d'un gros volume de "Super Phénix" de
470 pages. Une fois encore, ce mégadossier remporte un
succès immédiat.
Troisième période
ou : l'oiseau vole de plus en plus haut.
Numéro 16 : mars 1989 (274 pages)
Phénix tient la grande forme et consacre un dossier à
pas moins de cinq auteurs : Philipp Mann, Bruce Sterling,
David Brin, William Gibson, Tim Powers. À l'époque, ces
auteurs sont peu connus, mais depuis, ils ont fait du
chemin ! Interviews des auteurs, accompagnées de deux inédits
de Philipp Mann et David Brin.
Nouvelles traduites de l'espagnol et de l'anglais.
Revues nouvelles : Le Courrier SF, L'Encrier Renversé,
Mellonta. Une petite équipe, formée de Marc Bailly,
Pierre Efratas, Bernard Goorden et David Martin, se rend
à Clermont-Ferrand. Après avoir commis quelques tours
pendables sur lesquels il y a heureusement prescription,
les quatre mousquetaires participent à l'une des plus
belles manifestations du genre. À cette occasion, Norman
Spinrad, très en forme, déclare : " La SF américaine,
c'est 95 % de merde ! " Là-dessus (phénomène de
compensation ?), Bernard Goorden avale un nombre appréciable
de croissants dans sa chambre d'hôtel en se répétant
qu'heureusement il reste les 5 %.
Numéro 17 : juin 1989 (326 pages)
Cette fois, le dossier est consacré à Daniel Walther,
ce qui entraîne un face-à-face épique entre Marc De
Leeuw et Pierre Efratas, et un débat (presque) courtois
de plusieurs pages. Interview avec Michel Lamart et
nombreux inédits de Walther. À ce sommaire déjà
copieux s'ajoutent des nouvelles traduites du russe et du
polonais, ainsi qu'un inédit de R.A. Lafferty.
Nouvelle revue : Humeurs et rumeurs.
Le comité de rédaction évolue aussi rapidement que la
revue : départ d'Eric Dejaeger et de Daniel
Derbaudrenghien ; arrivée de Daniel Van Boxlaer.
Les Phénix numéros 12, 13 et 15 sont épuisés.
Parution du Chimère numéro 4 avec, bien entendu, un
recueil de Daniel Walther.
Délégation de Phénix, qui déploie ses tréteaux à
l'occasion d'une grande rencontre du livre fantastique et
SF à Roanne. Marc Bailly, Pierre Efratas, Daniel Van
Boxlaer et Jean-Claude Vantroyen y rencontrent plusieurs
auteurs québécois. Face à un Vantroyen éberlué,
Grands-Pas est pris de transe mystique : il s'en prend
aux nuées grises qui déversent leur content de flotte
et, pour parvenir à ses fins, finit par faire appel à
Kvar, le Dieu des Dieux, qui écarte la nuée. Long
silence atterré, suivi d'une incartade autoroutière de
M.B. qui convie un infortuné chauffard à un duel à la
perceuse-foreuse. Hormis ces actes irresponsables qui dénotent
un manque absolu de maturité, Phénix a vendu un grand
nombre d'exemplaires de sa production.
Numéro 18 : septembre 1989 (276 pages)
Le dossier de ce superbe numéro est consacré à Isaac
Asimov et comporte une interview de Jean-Pierre Andrevon.
Phénix poursuit des expériences innovatrices en
inaugurant un courrier des lecteurs décapant, mais qui
durera ce que durent les roses : " Flammes, fumées
et cendres. "
Poursuivant sur sa lancée quelque peu frondeuse, l'équipe
de Phénix décide de provoquer une interrogation,
qu'elle espère salvatrice, sur l'attribution des prix.
Cette action irrespectueuse mobilise de nombreux lecteurs
qui " nominent " des textes parus dans ses
pages. Ce crime de lèse-dinosaure, pourtant des plus démocratique,
provoque un beau scandale dans le landerneau. Sur les
cinq prix sortants, quatre sont sélectionnés, le cinquième
étant évidemment le vainqueur.
À l'occasion d'une mini-convention, délégation à
Paris constituée de Marc Bailly, Marc De Leeuw et David
Martin.
Une nouvelle revue montre le bout du nez : CSF.
Numéro 19 : décembre 1989 (242 pages)
Ignorant encore le succès que va rencontrer ce numéro,
réédité et augmenté encore deux fois par la suite,
notre dossier est consacré au grand John Ronald Ruell
Tolkien. À cette occasion, Phénix amplifie encore sa
technique d'observation à regards multiples : un auteur
n'est plus analysé par le truchement de la seule littérature,
mais l'est aussi par le déploiement de son imaginaire
dans d'autres formes d'art.
Ce nouveau numéro-événement comporte également des
interviews de Patrice Duvic et de Pierre K. Rey.
Parution de Chimère numéro 5, consacré aux nouvelles
québécoises.
Il s'agit là du dernier numéro réalisé sur notre
Schneider déclassé.
Quatrième période
ou : l'oiseau prend des couleurs.
Numéro 20 : février 1990 (152 pages)
On n'a pas tous les jours vingt numéros. Le moment est
donc venu de nous lancer sur les chemins périlleux du
" desktop publishing " (prononcer desquetopeu
publie shingeu). Ce numéro inaugure donc notre nouvel
ordinateur Atari à imprimante laser pour l'achat duquel
une poignée de fous a investi ses maigres économies. Le
résultat est encourageant : la couverture est en quadri,
la maquette revue de fond en comble. J'allais oublier :
Phénix a cinq ans. Au cours de ces 60 mois de travail,
128 nouvelles de 77 écrivains ont été publiées dans
nos pages, de même que 141 articles et 30 interviews.
Dossier du numéro : Norman Spinrad, avec interview de
l'auteur. Articles, notamment, de Dartevelle, Walther et
Spinrad.
Une nouvelle revue apparaît : il s'agit de Temps tôt.
Daniel Van Boxlaer nous quitte et Patrick Lehance nous
rejoint.
Numéro 21 : avril 1990 (234 pages)
Et voici que se lève " Mirages 1990 ",
anthologie annuelle composée par Richard Comballot. 14
textes formidables, du grand travail qui sera fortement
apprécié des spécialistes, mais qui mettra quelque
temps à se vendre au grand public. Comme quoi, on ne
peut pas tout avoir...
L'équipe de Phénix se rend à la Convention Française
de S-F à Thionville avec une petite cohorte composée de
Marc Bailly, Pierre Efratas, Patrick Lehance, David
Martin et Jean-Luc Varenne. Joli succès d'estime à
cette occasion.
Numéro 22 : juin 1990 (214 pages)
Phénix continue à prendre des risques en consacrant son
dossier à un monument des littératures de l'imaginaire,
hélas quasiment méconnu : Gustav Meyrink. Celui-ci
inspire de nombreux articles et nous parvenons à publier
trois de ses nouvelles.
Parution de Chimère numéro 6 dédié à Jean-Emile
Garrido.
Numéro 23 : août 1990 (218 pages)
Numéro spécial nouvelles intitulé " O, Gouffres !
" S'y côtoient des textes provenant de toute la
francophonie : belges, français, québécois, ainsi que
des créations anglo-saxonnes.
À lire également : l'article de Daniel Walther intitulé
"Une revue pour la SF" qui constitue un fort
joli manifeste pour l'époque, texte qui fut prononcé à
Thionville. En voici quelques extraits significatifs:
" Le sentiment que j'éprouve est celui d'une
obsolescence générale. L'obsolescence d'un genre littéraire
que tout, en quelques années, a contribué à figer dans
des moules. (...) Fiction agonise interminablement. (...)
Je refuse de croire qu'une bonne revue refuserait obstinément
de se vendre. (...) Et puis, si une revue doit être
vivante, animée combative, pamphlétaire au besoin, elle
doit absolument contourner la discussion de principe.
(...) Je pense à des batailles sur des sujets aussi
rebattus et canulants que :
- Quelles sont les différences intrinsèques entre le
fantastique et la science-fiction ? A-t-on le droit de
faire ceci ou cela ? (...) Les temps sont mûrs pour une
nouvelle révolution dans la littérature de l'imaginaire.
(...)"
Entrée de Jean-Luc Varenne dans le comité de rédaction.
Numéro 24 : octobre 1990 (288 pages)
Ce vingt-quatrième numéro permet de mieux cerner le génie
multiple d'un auteur alors en pleine ascension : Serge
Brussolo. On y trouve une pléiade de contributions, des
articles, des interviews et des nouvelles. À sa lecture,
on se pose aujourd'hui deux questions essentielles :
Brussolo, où es-tu ? Brussolo, que fais-tu ? Et de crier
: " Serge, reviens! ". Nous espérons qu'il
nous entendra...
Numéro 25 : décembre 1990 (208 pages)
Cette période, faste en cadeaux, pousse notre équipe à
se multiplier.
Sous le sapin, un spécial Noël composé de 17 nouvelles
joliment brodées sur le thème de... eh bien oui, quoi :
de Noël.
Dans les petits souliers du bon Papa N., publication de
Chimère numéro 7 consacré à Jean-Paul Roneker.
Sur la table, publication de "État de siège",
pièce de théâtre de Michel Lamart.
En guise de hors-d'uvre, édition des "Moustaches
de Baalmoloch" numéro 3.
Et, en plat de résistance, publication du livre : "Les
illustrateurs de Jules Verne" de Jacques Van Herp.
C'est tout pour cette fois.
Numéro 26 : février 1991 (260 pages)
Quoi ? Déjà ? Mais oui : voici " Mirages 1991
", 2e anthologie de la série choisie par Richard
Comballot. 15 textes d'auteurs de langue française de
tous horizons. Un " must " du genre.
Philippe Lemay rejoint le comité de rédaction.
Numéro 27 : avril 1991 (332 pages)
Phénix prend du poids avec ce dossier Michael Moorcock
qui comporte trois inédits de ce virtuose de la plume.
On y trouve aussi de nombreux articles signés par des
francophones et des Anglo-Saxons, sans compter plusieurs
entretiens.
Publication coup sur coup de Pégase numéro 1 en avril,
et de Pégase numéro 2 en mai.
Au rayon des nouvelles revues, voici qu'apparaissent
Miniature et KBN.
Numéro 28 : septembre 1991 (352 pages)
Nouveau petit événement avec la parution de ce Phénix
sous le thème de " Chauds Effrois, 18 nouvelles inédites
". Comme à l'accoutumée, on y retrouve des textes
d'auteurs français, belges, québécois et anglo-saxons,
et notamment des textes de Mann, Lafferty, Ligny, Pagel.
À cette occasion, notre ami Alessandro Arturo publie sa
première nouvelle.
Interviews de Jean-Claude Dunyach, Raymond Milési,
Jacques Barbéri, Pierre Stolze, Jean-Marc Ligny.
La rubrique " Flammes, fumées et cendres ",
ouverte aux lecteurs, montre combien le petit éditorial
qui la précède est fondé : " Phénix ne laisse
pas indifférent. (...) La manifestation la plus évidente
de cette situation est notre courrier des lecteurs.
Abondant, parfois très dur, parfois chaleureux jusqu'à
l'émotion, il nous adresse des signaux dont nous ne méconnaissons
jamais les directions. "
Publication de Chimère numéro 8 consacré à Fritz
Leiber et du troisième numéro de Pégase.
Numéro 29 : décembre 1991 (300 pages)
Trois cents pages tout rond et un dossier Stephen King
qui va crever les plafonds de vente : aussitôt publié,
il est presque aussitôt épuisé. Ce qui ne nous empêche
pas de signaler qu'il comporte de nombreux articles, et
notamment des contributions d'auteurs blanchis sous le
harnais comme Daniel Walther, Serge Brussolo et Jean-Marc
Ligny. Cerises sur le gâteau : un inédit de Ramsey
Campbell et un autre d'Alain Dartevelle.
Dans l'édito, nous faisons preuve d'un bel optimisme et
nous abondons de projets (Chimère, Pégase, collection
de romans, projets multimédias). Tous ne se réaliseront
pas, mais sans cette dose d'utopie, il est probable que
vous ne liriez pas ce numéro. Arrivée dans l'équipe de
Alessandro Arturo et Jean-Paul Ehrard.
Numéro 30 : mars 1992 (286 pages)
On pourrait croire qu'après la sortie de décembre, le
printemps sera frisquet. Erreur : nous publions "
Les sortilèges des 19 portes, 19 récits extraordinaires
à découvrir prudemment ". Il s'agit de nouvelles
francophones, anglo-saxonnes et hispaniques.
Dans la foulée, publication de Pégase numéro 4.
Cinquième période
ou :
à force de voler de cime en cime, l'oiseau commence à
émettre de la fumée.
Numéro 31 : juin 1992 (272 pages)
Nous produisons là un numéro quelque peu atypique,
puisque le thème choisi est : " Écrire sur Borgès
". On y trouve, sous forme d'hommages, des nouvelles
de Michel Lamart, Jean-Claude Dunyach, Alain Dartevelle,
Pierre Stolze, Daniel Walther et de nombreux articles. Le
dossier est réalisé avec maestria sous la houlette de
Michel Lamart. Et la maquette, sans doute une des plus
esthétiques à ce jour, est signée Murielle Briot.
Interviews de Serge Brussolo et de Pierre Efratas, ainsi
que de Jean-Claude Alizet.
Texte hommage de Daniel Walther à propos de Vladimir
Colin qui vient de mourir.
Entrée dans le comité de rédaction de Jean-Claude
Etienne et Roger Stekke.
Publication de Chimère numéro 9 consacré à Raymond Ané.
Publication de Pégase numéro 5. Ces deux publications
en sont à leur dernière parution, car elles exigent
trop d'efforts par rapport aux résultats. Cet arrêt
brutal constitue le signe d'une crise qui ne va cesser de
croître jusqu'au numéro 37 : la conception, la réalisation,
la diffusion et la distribution sont toutes réalisées
par une seule et même équipe de bénévoles. Le fardeau
commence à peser, et chacun espère que la
professionnalisation sera pour demain.
Numéro 32 : septembre 1992 (368 pages)
Il s'agit de notre première réédition, actualisée et
augmentée. Celle-ci est consacrée au numéro 11 relatif
à Jean Ray. Dossier réactualisé et augmenté.
Phénix se rend à la convention française qui se tient
à Redu, en Wallonie. Marc Bailly, Bruno Peeters et Roger
Stekke composent une délégation qui, sans rien renier
de son enthousiasme et sans attraper la grosse tête (c'est
juré), replie rapidement bagage face à l'exiguïté des
locaux. Au retour, chacun s'essaye à chanter en catimini
" In the Ghetto " (cf. introduction).
Numéro 33 : décembre 1992 (432 pages)
Et une nouvelle réédition, une ! Il s'agit du numéro
19 consacré à Tolkien. Le dossier est réactualisé et
augmenté.
Grand moment, puisque Phénix quitte Bruxelles et
atterrit maintenant à Racour, riante petite localité
sise en province de Liège. Les locaux sont nettement
plus vastes et Bailly y respire non point l'air des
cimes, mais en tout cas des effluves rupestres. Là-dessus,
retour au rythme trimestriel, interview de monsieur Alain
le Bussy qui connaît alors une percée méritée et qui
signe pour nous une nouvelle inédite.
Rubrique flambant neuve de Jean-Marc Ligny : " L'âme
de l'Alien ".
Numéro 34 : mars 1993 (374 pages)
Dossier Clive Barker réalisé par Gilles Bergal. Ce numéro
est dédié à Gérard Coisne qui vient de mourir. Le
dossier comporte de nombreux articles d'auteurs français
ou étrangers, ainsi que des interviews de Barker et de
Peter Atkins, et des nouvelles francophones, anglo-saxonnes
et italiennes. Interviews de Serge Brussolo et Marc De
Leeuw.
Olivier Merveille et Pascal Munaretti viennent renforcer
notre équipe.
Numéro 35 : septembre 1993 (514 pages)
Et voici une troisième réédition revue et augmentée
du numéro mythique consacré à Lovecraft.
Création de la collection " Les Dossiers de Phénix
" avec la sortie du premier volume où l'on retrouve
un numéro Tolkien encore ragaillardi. Sortie également
de la plaquette de Jean-Christophe Requette " I am
Providence " et de la plaquette de Christophe
Kauffman " Stephen King : de l'angoisse à la peur
".
Nouvelles francophones, italiennes et espagnoles.
Interviews de Norman Spinrad et de Jean-Paul Jennequin.
Vous avez remarqué cette tendance de Phénix à produire
des rééditions en série ? C'est que la charge de
travail pèse de plus en plus sur les épaules de notre
équipe, et la plupart de ses membres ont l'impression de
tourner en rond, de ne pouvoir progresser au-delà du
stade du semi-fanzine.
Numéro 36 : mars 1994 (574 pages)
Disparition de Roger Stekke. Un coup terrible qui nous
affecte tous et auquel je consacrerai un éloge, dont
voici quelques extraits. : " Roger est mort avec un
courage qui nous a donné une fameuse leçon de vie. Pas
une seconde, il n'a songé à abandonner, et lorsqu'il a
glissé dans les bras froids de l'inéluctable, il
luttait encore, cet incroyable bonhomme ! Tu crois que je
panégyrise, que je donne dans la condoléance ? Laisse-moi
te rapporter ses derniers mots, quelques heures avant...
'Dis au revoir à l'équipe de Phénix. J'ai été
heureux de les connaître'.
À peine assis aux réunions, tu nous balançais des
suggestions à pleines brassées. (...) Sans toi, c'est
évident, nous n'aurions pas aussi bien progressé.
"
Ce numéro-mammouth, ce numéro qui a mis des mois à
sortir de presse, et dont nous ignorions alors qu'il clôturerait
toute une époque, est consacré à Henri Vernes. Le maître
d'uvre n'est autre que notre ami Bruno Peeters qui
fait le tour de la question grâce, notamment à de
nombreuses interviews (Vernes, Lefrancq, Attanasio,
Schellens). Interviews également de Gilbert Gallerne,
Alain le Bussy, Jacques Finné et Bernard Goorden.
L'éditorial aborde les thèmes du renouveau, du souffle
nouveau qui nous anime et, dans notre optimisme, nous
tirons des plans sur la comète. Les faits vont se
charger de nous rappeler la difficulté qu'il y a de
poursuivre un projet comme le nôtre sans parvenir à
passer la vitesse supérieure. Les plus beaux projets,
les plus ambitieux (ceux de Marc, les miens, les autres)
se cassent le nez sur le mur de l'argent et des moyens
matériels. Dès lors, la mésentente s'installe et
quelque chose se brise qu'on ne retrouvera plus : une
dynamique quasiment olympique -altius, citius, fortius -,
un état d'esprit militant, porté à l'action
collective, insoucieux du qu'en-dira-t-on, une manière
idéalisée d'envisager la passion littéraire, et aussi
la certitude que l'enthousiasme constitue le premier des
carburants.
Philippe Lemay et Pascal Munaretti s'en vont et font
place très provisoirement à Alain le Bussy, Christophe
Kauffman, Yvon Godfroid et Dominique Warfa.
Christophe Corthouts laisse un message sur le répondeur
de Marc Bailly. Un nouvel auteur est né, et aussi un
nouvel animateur de Phénix.
Sixième période
ou : l'oiseau s'écrase et meurt.
Un an de silence, un an de réflexion, un an de repos. Un
an de remise en question. Après une période de
tergiversations, Marc Bailly se dit qu'il n'est pas
encore allé au bout du rêve. Que s'il n'essaye pas
encore, il le regrettera toute sa vie. Plusieurs projets
et idées voient le jour, et l'une d'elles est de
s'associer à un éditeur. Après plusieurs tentatives
infructueuses, et grâce à Bruno Peeters, rendez-vous
est pris avec Lefrancq.
Septième période
ou : l'oiseau renaît de ses cendres.
Numéro 37 : mars 1995 (442 pages)
Une fois en contact avec Claude Lefrancq, l'entente se
fait très vite. Marc Bailly et Claude Lefrancq sont sur
la même longueur d'ondes. Un accord verbal est pris. Ouf
! L'aventure peut continuer. Phénix entre dans une ère
nouvelle, celle de la professionnalisation tant espérée
et tant méritée.
La ligne éditoriale sera dans la veine de la littérature
populaire : nous considérons que la littérature que
nous aimons a trop souffert des batailles de docteurs de
la foi et nous décidons de donner à nos pages plus de
simplicité. C'est ainsi que les auteurs moins connus ou
plus " difficiles " seront hissés sur le
pavois par les vedettes, par les signatures les plus
connues, les plus emblématiques. Notre distribution
touchera désormais un maximum de points de vente et nous
n'aurons plus qu'une chose à faire : nous préoccuper du
contenu et le mettre en page. Cette ligne prendra
quelques numéros pour se mettre définitivement en place.
Ce numéro 38 comporte un dossier " Terreur "
avec, notamment, des nouvelles de Ramsey Campbell, Alain
Dartevelle et Jean-Marc Ligny, des interviews de Robert
Bloch, Iain Banks et une biblio complète de tous les
auteurs.
S'y ajoutent les interviews de Lorris Murrail, de Daniel
Compère et de Chris Lamquet, ainsi qu'un dossier sur les
armes dans la S-F.
Denis Labbé fait désormais partie du comité de rédaction.
Numéro 38 : juin 1995 (364 pages)
Pour sa renaissance, Phénix a commencé à changer de
plumage : le format reste quasiment identique, mais la
couverture est plus achevée, plus accrocheuse, et la
mise en page intérieure ressemble fort à celle d'un
gros livre. Cependant, nous sentons bien que le format
n'est pas encore totalement celui auquel nous rêvons...
Le dossier de ce numéro est consacré à Koontz/Masterton.
Deux inédits et une interview de Masterton accompagnés
de nombreux articles et des bibliographies complètes des
deux auteurs.
Interview de Alain Dartevelle et de Yves Huppen.
Alain le Bussy, Dominique Warfa et Yvon Godfroid quittent
l'équipe.
Phénix se rend à la convention de S-F de Nancy en
compagnie de Renato Lazzaroni, Christophe Corthouts,
Pierre Efratas, Bruno Peeters et Marc Bailly. À cette
occasion, nous percevons que quelque chose est (enfin) en
train de bouger dans l'Hexagone. En dépit des petites
mesquineries traditionnelles de clans et de chapelles,
les gémissements de rigueur font place à un esprit plus
combatif. Tout cela nous réjouit fort, d'autant que
notre nouvelle formule fait sensation et contribue à ce
nouvel élan.
Numéro 39 : décembre 1995 (442 pages)
" Blood, sweat and tears ! ", comme dirait
monsieur Toubon, quelle superbe couverture et quel
plantureux contenu. Le numéro est consacré à madame
Anne Rice et aux vampires. Cette dame aussi talentueuse
que mordante nous accorde une interview exclusive et nous
le lui rendons bien en lui consacrant une série
d'articles de fond. Laurent Genefort, Jacques Goimard et
Sirius nous font également l'honneur de nous accorder
des entretiens.
Bonne nouvelle : Christophe Corthouts vient de rejoindre
notre équipe.
Numéro 40 : mars 1996 (416 pages)
Sous la houlette de Bruno Peeters et de votre serviteur,
ce numéro est totalement consacré à un gros "
Dossier Fantasy " avec de nombreux articles et des
interviews de Piers Anthony, U.K. Le Guin, Anne Mc
Caffrey, Terri Pratchett, et L. Sprague de Camp.
Autre cadeau aux lecteurs : une interview de Benoît
Peeters. C'est le dernier numéro à chiffres variables :
désormais, on proposera toujours 288 pages standard.
Numéro 41 : juin 1997 (288 pages)
Après de nombreuses discussions avec l'éditeur et le
distributeur... après moult remises en question et
plusieurs projets, voici le nouveau plumage de Phénix.
Le format est celui d'un " poche ", les sujets
sont plus variés, les rubriques ont été diversifiées,
et le contenu colle plus à l'actualité. Bref, il s'agit
là d'un travail plus commercial et plus attractif.
Dans ce numéro de la nouvelle génération, Christophe
Corthouts signe un substantiel dossier sur Star Wars. On
retrouve des nouvelles de Brian Lumley, S. P. Somtow, une
interview de Mister Orson Scott Card et une présentation
de Mercedes Lackey, entre autres. Ces sujets sont
utilement complétés par une longue rubrique BD et par
une autre concernant le cinéma. N'oublions pas non plus,
dans la rubrique "Critiques", Le Livre du
Bimestre.
Sara Doke et Frédéric de Thiers font leur entrée dans
le comité. Leur érudition nous apportera beaucoup.
Numéro 42 : septembre 1997 (288 pages)
Dossier " X-Files " retentissant. Interview
d'une demoiselle bourrée de talent qui sait comment
faire parler d'elle : Amélie Nothomb. Nouvelles de
Richard Laymon. Découverte de Jacques Baudou.
Numéro 43 : décembre 1997 (288 pages)
Le tour des grands dossiers populaires se poursuit. Voici
donc, c'était écrit, un dossier des plus solides sur
" Michael Crichton, l'homme qui ressuscite les
dinosaures ". À la barre de ce numéro : Christophe
Corthouts, Olivier Merveille, Norman W. Molhant.
Interviews de Jacques Chambon et de Alain Dartevelle,
nouvelle de F. Paul Wilson et découverte de Jennifer
Robertson.
Numéro 44 : février 1998 (288 pages)
On continue à passer les grands thèmes en revue ?
D'accord. Alors, voici un dossier sur les extraterrestres
où Christophe Corthouts, Sara Doke, Marc (De Leeuw, en
pleine forme comme jadis), Pascal Celli, Alessandro
Arturo et Olivier Merveille donnent leur pleine mesure.
Interview de Philippe Geluck, nouvelles de Robert
McCammon et Stanley Wiater (entre autres), découverte de
Poppy Z. Brite.
Numéro 45 : avril 1998 (288 pages)
Sara se déchaîne : on ne la tient plus, et c'est tant
mieux, avec ce dossier sur " Les jeux de rôle &
le phénomène Magic ". Une interview de Serge
Lehman. Une autre de Pierre Bordage. Une troisième de
Jacques Mercier. Des nouvelles de Thomas F. Monteleone,
et Christophe Corthouts fait plein feu sur Jean-Pierre
Jeunet.
Numéro 46 : juin 1998 (288 pages)
Le dossier est consacré à une Statue de Commandeur, je
veux parler de Marion Zimmer Bradley à laquelle Sara, décidément
en verve, compose un corpus royal, digne d'elle. On y
trouve également des interviews de Thomas Owen, René
Hausman, et Guy Delmot, animateur du Festival du Film
Fantastique de Bruxelles, l'un des plus importants
d'Europe avec 15 000 participants. Découverte consacrée
à Richard Laymon.
Numéro 47 : août 1998 (288 pages)
Dossier " Serial killers " rassemblé par
Christophe Corthouts. On y trouve également trois
moments précieux, à savoir les interviews de Robert
Hossein, de Robert Englund, et de Neal Stephenson. Des
nouvelles de Stanley Wiater, Chet Williamson et Dennis
Etchison complètent le numéro.
Numéro 48 : octobre 1998 (288 pages)
Olivier Merveille, Thierry Jandrok, Pascal Celli, Sara
Doke, Huguette Marshmallow, Alain Duret composent un
dossier qui pose pas mal de questions impertinentes : il
s'agit de "Retour vers le futur". Pour conclure
ce dernier numéro de l'époque Lefrancq (Quoi ? Elle
s'achève ? Et pourquoi ? Voir ci-dessous), des
interviews de Ayerdhal, Mike Resnick et de toute l'équipe
de l'anthologie "Escales sur l'horizon".
Huitième période
ou : l'oiseau meurt et renaît d'un seul coup d'aile.
Au moment où j'écris ces lignes, Phénix aura,
une fois de plus, bien mérité son nom : pour la deuxième
fois dans notre longue histoire, nous avons décidé de
mourir pour mieux renaître.
Les raisons en sont fort simples et Marc Bailly en
fait part dans l'éditorial.
Je n'y reviendrai donc pas, sauf pour dire que si nous donnons tant aux littératures de
l'imaginaire, c'est qu'à nos yeux, celles-ci ne
constituent pas un simple loisir comparable, par exemple,
au jeu de cartes ou au tir aux clays ; un plaisir fugace
quelque peu clandestin ; une toquade de collectionneur ou
de monomaniaque. Il s'agit, comme pour l'écriture, comme
pour la création, comme pour l'art, d'une contribution
particulière au bonheur de vivre, au questionnement
constant qu'appelle l'évolution de nos sociétés. Il
s'agit de faire surgir, chaque jour qui passe, les forces
de l'imagination. Celles qui transfigurent le monde et
nous donnent des raisons de rêver et d'espérer.
Bon anniversaire, l'oiseau.
Phénix a fini par mourir pour de bon ! Bailly, le bonimenteur, l'a publié suir le web, puis a trouvé un naïf pour financer sa parution papier.
Mais cela n'a duré qu'un numéro...
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